Déclaration du Synode de l’Eglise Evangélique d’Autriche

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Eglise Evangélique d’Autriche. Synode 1998

Austria       29/10/1998

Nos Eglises reconnaissent dans la honte ne pas s’être montrées sensibles au sort des juifs et d’innombrables autres persécutés. Ceci est d’autant plus incompréhensible que les chrétiens évangéliques ont eux-mêmes, lors de la Contre-Réforme, été l’objet de discrimination et de persécution. Les Eglises n’ont pas protesté contre le tort bien visible qui s’exerçait. elles se sont tues, ont détourné le regard, elles n’ont pas "empêché la roue de tourner" (Bonhoeffer). Et c’est ainsi que non seulement des chrétiens et des chrétiennes, mais également nos Eglises, partagent la faute de l’Holocauste/de la Shoa.

Nous faisons mémoire avec affliction de tous les persécutés, auxquels furent enlevés leurs droits de citoyens et leur dignité humaine et qui furent livrés à une humiliation sans égards, voire assassinés dans les camps de concentration.

Le synode général prie la communauté Israélite de Vienne et les juifs d’Autriche d’accepter ici ce dont nous les assurons :

Les Eglises évangéliques savent qu’il est de leur devoir de veiller au souvenir des souffrances du peuple juif et de la Shoa.

Les Eglises évangéliques savent qu’il est de leur devoir de veiller à leur doctrine, à leur enseignement, à la pratique ecclésiale en ce qui conceme l’antisémitisme et de s’opposer aux préjugés exprimés dans les medias.

Les Eglises évangéliques savent qu’il est de leur devoir de combattre tout antisémitisme, celui des groupes comme celui des personnes.

Les Eglises évangéliques veulent baliser un chemin commun pour un nouvel avenir de la relation entre juifs et chrétiens.

Nous nous efforcons donc de réfléchir à ce que peuvent être les rapports entre chrétiens évangéliques et juifs et voulons les réaliser suivant cette reflexion.

Le développement de l’antisemitisme et son aboutissement dans la Shoa representent pour nos Eglises évangéliques et pour nos chrétiens un défi qui va jusqu’aux racines de notre foi. Le Dieu des chrétiens n’est pas un autre Dieu que celui d’Israël, qui a appelé a la foi Abraham et choisi les Israélites captifs pour être son peuple.

Nous nous reconnaissons dans le choix d’Israël comme peuple de Dieu. "Cette alliance, Dieu ne l’a pas dénoncée" (Martin Buber). Elle reste jusqu’à la fin des temps. Dans l’évangile de Jean, nous lisons, comme parole de Dieu : "Le salut vient des juifs" (Jn 4, 22). Dieu lui-même est le salut qu’il apporte à son peuple et qu’il donne à tous en la personne du juif Jésus, que nous confessons comme étant le Christ. Car Dieu "veut que tous les hommes soient aidés et parviennent à la connaissance de la vérité" (1 Tm 2,4).

Les discussions sur la place de Jésus et de la bonne nouvelle contenue dans le Nouveau Testament ne peuvent être utilisées contre les juifs. Le fait que cette bonne nouvelle ait été proclamée parmi les juifs a été tu par la communaute chrétienne d’origine païenne. L’Eglise a eu conscience d’être seule choisie comme peuple de Dieu et s’est autorisée à affirmer le rejet d’Israël, et depuis lors des affirmations excessives anti-juives jalonnent l’histoire de l’Eglise.
Dans ce contexte, les écrits tardifs de Luther et leur exigence de la dispersion et de la persecution des juifs nous accablent. Nous rejetons le contenu de ces écrits.

Le racisme biologique et politique des 19ème et 20ème siècles a ainsi pu utiliser l’anti-judaïsme chrétien dans un but religieux et idéologique. II y a eu peu d’opposition à cela, et même des chrétiens évangéliques - y compris des pasteurs - ont pris part à la propagande antisémite. Lorsque des Eglises ont accueilli des juifs persécutés, ce fut principalement lorsqu’ils étaient baptisés.
Ce passé ainsi hypothéqué qui est le nôtre réclame une conversion, et celle-ci s’étend à la facon d’exposer l’Ecriture sainte, la théologie, l’enseignement ainsi qu’à la pratique de l’Eglise.
Lorsque nous, chrétiens, nous lisons la Bible en deux Testaments comme une unité, il faut tenir compte du commentaire juif de l’Ancien Testament, sachant bien que pour les juifs le Nouveau Testament ne fait pas partie des Livres Saints.

Des différences d’interpretation de l’Ecriture peuvent être maintenues dans une tolérance réciproque. "Les symboles que la Bible utilise en signes d’espérance sont une incitation à l’effort commun qui vise l’édification d’un monde de justice et de paix" (Assemblée oecuménique d’Erfurt, 1996).

Pensons que le Nouveau Testament - qui annonce Jésus Christ comme le sauveur du monde - a été écrit avant tout par des juifs.
Notre Seigneur Jesus Christ était, par son origine, par sa culture, par sa foi en Dieu, juif, et il est à comprendre comme tel.
Comme l’a conclu l’assemblée oecuménique d’Erfurt de 1996,l’annonce chrétienne de la foi doit apprendre à "reconnaitre le judaïsme comme une dimension préexistant au christianisme, qui existe parallèlement à lui, qui est vivant et qui a de nombreux aspects. Ceci interdit tout sentiment de supériorité".

Dans la "Déclaration sur la rencontre entre chrétiens luthériens et juifs" de l’année 1990,l’idée est exprimée que c’est Dieu lui-même qui envoie les hommes. Cette "mission de Dieu" fait comprendre quels sont les propres possibilités et devoirs de chacun. "Dieu habilite au témoignage réciproque de foi, dans la confiance en la libre action de l’Esprit, car c’est lui qui décide de l’effet du témoignage et du salut éternel de tous les hommes. Il délivre de la contrainte de devoir soi-même agir. Ainsi comprend-on que les chrétiens ont le devoir de considérer leur témoignage et leur service dans le respect de la conviction et de la foi du partenaire juif dans le dialogue".

L’alliance de Dieu avec son peuple existe par sa grâce jusqu’à la fin des temps, aussi exercer une mission parmi les juifs n’a pas de justification théologique et doit etre rayé d’un projet d’Eglise.
Le dialogue des chrétiens avec le judaïsme, quant à sa racine, est à distinguer fondamentalement d’un dialogue des chrétiens avec d’autres religions.

L’Etat d’Israël a été fondé il y a 50 ans. Nous lui souhaitons justice et paix. Nous espérons, et nous le demandons à Dieu, que cet Etat pourra trouver une paix solide avec ses voisins, particulièrement avec le peuple palestinien, dans le respect réciproque du droit à une patrie, de sorte que juifs, chrétiens et musulmans puissent vivre ensemble pacifiquement.

Nous nous associons sincèrement à la recommandation du Conseil oecuménique des Eglises en Autriche, de célébrer le 17 janvier, jour du début de la semaine mondiale de prière des chrétiens pour l’unité, comme un jour d’union avec le judaïsme, en incluant le peuple juif dans dans nos intentions de prière.

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Inserito 01/01/1970