Texte de Cincinnati au Sujet des Relations Judéo-Chrétiennes

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Synode de l'archidiocèse de Cincinnati

Stati Uniti d'America       1970

INTRODUCTION.

La déclaration (Nostra Aetate) du deuxième concile du Vatican a inauguré une nouvelle époque dans les relations judéo-chrétiennes. C'est donc en reconnaissant pleinement nos frères juifs comme peuple de Dieu, et en partageant le patrimoine commun donné par le Dieu unique, notre Père, que nous entrons avec espoir dans cette nouvelle époque.

Nos grandes familles religieuses partagent les sources communes de l'Ecriture Sainte et de certaines traditions. Toute unité sera établie sur la base de cet héritage commun. Les relations oecuméniques reposent sur des relations entre les différentes croyances. Par conséquent, en continuant notre tâche de renouveau en tant que membres du Corps du Christ, nous devons réfléchir sur les racines de notre foi dans l'Ecriture et dans la Tradition, qui, toutes deux, sont nées du peuple juif. Le Nouveau Testament lui-même affirme la valeur permanente des livres sacrés sur lesquels le judaïsme est établi et dont il est nourri. « N'allez pas croire que je sois venu abolir la Loi ou les Prophètes : je ne suis pas venu abolir, mais accomplir » (Mt 5,17). Les juifs sont « chéris à cause de leurs pères. Car les dons et l'appel de Dieu sont sans repentance » (Rm 11,28-29).

Nous devons nous rappeler qu'avant que puisse exister un vrai lien de compréhension entre catholiques romains et juifs, la tâche d'examiner notre commune histoire est indispensable. (,'holocauste nazi et l'établissement de l'Etat d'Israël nous demandent de regarder avec compassion et franchise la dimension de ces deux événements. Il nous faut examiner deux mille ans de diffamation et de persécution qui met le fardeau de démontrer de bonne foi sur les épaules du chrétien. Pour l'avenir, le souci continuel de l'intégrité de la conscience individuelle aussi bien que du respect de la personne devrait amener tout catholique romain à abhorrer toute manifestation d'antisémitisme, sous les formes nouvelles qu'il pourrait prendre dans notre société d'aujourd'hui.

Dans les contacts avec la communauté juive, les catholiques romains devraient se rappeler qu'il y a une divergence de points de vues parmi les juifs comme il y en a parmi les chrétiens. Le judaïsme, aussi, fait les premiers efforts pour arriver à l'union de ses trois grandes branches. Actuellement, la distinction entre les trois dénominations du judaïsme est plutôt une question de degré de pratique que de principes. Toutestrois trouvent leur authenticité en Dieu et dans la tradition juive. Celle du judaïsme orthodoxe se réalise dans l'adhésion totale à toute l'étendue des observations telles qu'elles ont toujours existé pour préserver les juifs. Le judaïsme conservateur reconnaît à peu près les mêmes principes que le judaïsme orthodoxe, mais il admet aussi une certaine évolution de la tradition et, avec prudence et respect, il se permet de juger certaines décisions du passé. Le judaïsme réformé admet les pratiques qui sont des préservations, il admet aussi non seulement l'évolution mais encore l'innovation comme faisant partie de la tradition juive. A cause de cette divergence des points de vue du judaïsme lui-même, les catholiques romains doivent s'attendre à une étendue très variée de participation de la part des groupes juifs.

Conclusions.

1. Ces quelques pistes, si elles étaient suivies, devraient augmenter notre compréhension du judaïsme et de la foi catholique romaine, éliminer des sources de tension et de malentendu, donner naissance à des dialogues ou à des conversations à des niveaux différents, multiplier des rencontres entre catholiques romains et juifs, et promouvoir la coopération dans l'action sociale.

2. Afin de coordonner et de soutenir ces directives un comité chargé des relations judéo-chrétiennes devrait toujours faire partie de la commission diocésaine des relations oecuméniques.

DIALOGUE - DISCUSSIONS ET CELEBRATIONS.

La plupart des relations entre chrétiens et juifs n'ont pas dépassé le stade du monologue. Maintenant il faut établir un vrai dialogue. Le dialogue, en effet, est le meilleur moyen de promouvoir une meilleure compréhension mutuelle et un approfondissement de ses propres traditions. Les conditions du dialogue sont le respect de l'autre comme il est, et l'estime de sa foi et de ses convictions religieuses. Puisque le dialogue, comme tel, n'a pas pour but de faire des convertis, l'intention de conversion est exclue. Une grande ouverture d'esprit, la méfiance de ses propres préjugés, et le tact sont des qualités indispensables pour ne pas blesser, même inconsciemment, l'autre partenaire.

Les études récentes faites par les experts dans la Bible et la liturgie ont montré qu'afin de comprendre pleinement la tradition et les institutions chrétiennes, il est indispensable d'examiner les institutions juives elles-mêmes, en profondeur. C'est particulièrement clair dans le cas de l'origine des sacrements. Les chrétiens ont adopté les fêtes et les prières juives, en les adaptant à la révélation apportée par le Christ. Leur signification fondamentale, pourtant, ne peut être saisie que par la référence constante aux influences de l'origine.

Conclusions.

1. Tout programme devrait être rédigé et développé de concert. Il devrait y avoir accord préalable quant aux objectifs, à l'ampleur, et aux limites de ces programmes, et toute rencontre devrait se faire dans un esprit de compréhension mutuelle.

2. Tous ceux qui participent à des discussions entre catholiques et juifs devraient être conscients du problème qui existe dans les relations judéo-chrétiennes, et l'on devrait éviter la terminologie qui pourrait être offensante pour l'autre. Les dialogues communautaires au niveau polulaire avec des participants bien préparés et la coopération de guides religieux des deux communautés sont recommandés. Afin d'inaugurer et de poursuivre efficacement un dialogue entre ces deux
communautés, on devrait consulter des experts en théologie, tenir compte de l'organisation sociale, et des techniques de relations interpersonnelles.

3. Les catholiques connaîtront plus profondément la vie du Christ et les sacrements qu'ils a institutés lorsqu'ils auront connu et compris les fêtes juives. On devrait étudier la possibilité d'une célébration conjointe de ces fêtes.

4. Les « open houses » entre les deux communautés et les échanges de visites des enfants des écoles pourraient être des moyens de promouvoir la bonne volonté et la compréhension entre juifs et catholiques.

EDUCATION.

Normalement l'éducation religieuse devrait diminuer les préjugés qui ont défiguré, historiquement, les relations humaines. Dans le passé, ce fut souvent l'enseignement religieux qui a nourri les préjugés contre le peuple juif à travers les générations. Même aujourd'hui les méthodes employées par les catholiques manquent souvent de ce respect élémentaire du juif.

Une vraie relation avec le peuple juif ne peut pas être complète tant que les catholiques restent étrangers à la Bible. Inévitablement les idées dépréciatives sur le peuple juif ne pourront disparaître tant que l'on sépare la prédication de Jésus et de ses Apôtres de son fond juif historique. On doit considérer l'histoire du peuple juif, celle d'avant comme celle d'après le Christ, avec sa signification particulière dans l'histoire du salut. On doit se souvenir surtout que:

a. Tous ceux qui sont responsables de l'éducation et de l'enseignement devraient s'informer, pendant leur formation, au sujet de la signification permanente du peuple juif dans le plan de Dieu pour l'homme. On ne devrait pas cacher l'histoire de la persécution et on ne devrait pas parler du peuple juif comme s'il n'existait pas.

b. Le peuple juif n'est pas collectivement coupable de la passion et de la mort de Jésus-Christ ni du rejet de Jésus comme Messie. Le peuple juif n'est pas damné, ni privé de son élection. Ses souffrances, sa dispersion, et la persécution qu'il a subie ne sont pas des châtiments pour la crucifixion ou le rejet de Jésus.

c. On devrait avoir grand soin de corriger dans l'enseignement et dans les homélies les interprétations des lectures bibliques, surtout celle de ces textes qui semblent parler défavorablement du peuple juif.

Conclusions.

1. On recommande les programmes éducatifs suivants:

— Instituts pour les prêtres, rabbins, et chefs laïques des deux communautés qui donneront l'occasion d'entendre les savants des deux communautés et qui permettront, au moyen de tables rondes, de discuter les héritages communs et leurs différences fondamentales;

— Programmes spéciaux d'éducation ou programmes de formation continue pour les professeurs;
Chercher à partager les ressources réciproques : l'enseignement en équipe devrait être inauguré en faisant collaborer les écoles secondaires, les collèges, les universités, les séminaires et les organisations juives et catholiques;

— On devrait prêter une grande attention à l'éducation des adultes. On pourrait entreprendre une étude conjointe de la Bible avec des conseillers des communautés catholiques et juives.

2. On rappelle aux chefs religieux des deux communautés que leurs chaires offrent un moyen puissant de faire avancer la compréhension mutuelle, l'amitié, et la coopération.

3. On devrait soumettre les textes scolaires, les livres de prière, etc., à une enquête constante afin d'éviter tout ce qui ne serait pas en accord avec le contenu et l'esprit des enseignements du Concile du Vatican. En même temps, on devrait faire un effort sérieux pour insérer dans ces livres un enseignement qui mette le rôle du judaïsme dans l'Histoire du Salut dans une lumière positive.

PRIÈRE COMMUNE.

Le culte juif est une affirmation de la croyance dans l'unicité de Dieu, aussi bien qu'une affirmation de la Communauté. On pense donc qu'il est souhaitable de rassembler des juifs et des chrétiens pour la prière. Quand cela est possible et mutuellement désiré, on devrait encourager la réunion dans la prière et la méditation silencieuse devant Dieu. Cela est particulièrement à propos pour les questions majeures de réparation, de réconciliation, et pendant les temps de persécution.

Conclusions.

1. Préparation des deux communautés pour ces réunions de prière.

2. Se servir de l'Ancien Testament pour ces prières.

3. Eviter dans le choix des textes bibliques ou des prières tout ce qui contient de la polémique.

4. Se servir des formules qui ne sont pas habituellement dans l'usage liturgique.

LA COMMUNAUTÉ.

Dans leur considération des problèmes de communauté, les chrétiens feraient bien de se rappeler la conception juive d'une sorte de « consécration » de l'univers. Le judaïsme reconnaît que l'homme n'est pas seulement une créature, mais que dans son action il coopère avec Dieu pour une création continue de l'univers.

Se souvenant que les miracles du Christ peuvent être considérés comme une sorte de guérison d'ordre social et que l'engagement social est partie intégrante des services du juif à son prochain, les catholiques devraient chercher à coopérer avec les juifs, individuellement ou par le moyen des organisations afin de trouver des solutions aux problèmes sociaux.

Dans l'âme juive la fidélité à l'Alliance a toujours été liée au don de la terre, et ce lien a toujours été pour les juifs l'objet d'une aspiration que les chrétiens devraient essayer de comprendre. D'innombrables fois les juifs ont signifié leur

attachement à la Terre promise à leurs ancêtres depuis Abraham. Les catholiques doivent essayer de comprendre et de respecter la signification religieuse de ce lien entre peuple et terre. On ne peut pas séparer l'existence de l'Etat d'Israël de cette perspective. Cela n'implique aucun jugement sur les événements historiques ou les décisions d'un ordre purement politique.

Conclusions.

1. Les catholiques devraient chercher à coopérer avec les juifs afin de coordonner les efforts qui ont pour but la solution des problèmes sociaux et le déracinement de l'antisémitisme.
2. Les catholiques devraient tâcher de comprendre le souci de la communauté juive pour l'Etat d'Israël, et ils devraient chercher à soutenir des efforts qui assureraient à tous une paix juste et permanente dans la Terre Sainte.

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Inserito 01/01/1970